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Je me souviens de l’image de Monseigneur Di Falco, interviewé quelque temps après la sortie de l’affaire. Vêtu notamment d’un gilet de laine grossière, le visage fatigué, il était manifestement atteint, marqué. On l’avait marqué au fer rouge de la pédophilie. Probablement ce que l’on peut faire de pire pour un prêtre. Et comme de trop nombreux cas ont été révélés, cela a suffi pour paraître crédible. Ce d’autant plus que le plaignant n’a in fine saisi que les tribunaux médiatiques et populaires, la Justice étant saisie de faits incontestablement prescrits. Ils ont donc, seuls, statué, avec le sens de la modération que l’on connaît aux medias et à la vox populi.
Ce qu’il dit ne manque pas de m’évoquer Dominique Baudis, pareillement broyé par une affaire fantasque :
« pour moi, le monde est désormais divisé en trois catégories. Ceux qui disent : « Je ne le connais pas, mais il n’y a pas de fumée sans feu » ; ceux qui pensent que je suis innocent ; et ceux qui s’en fichent. Il faut accepter de vivre avec. Chacun s’est fait son opinion. Et avec Internet, impossible d’oublier. »
Pour ma part, j’ajouterais une quatrième catégorie, celle à laquelle j’appartiens : ceux qui pensent qu’il est innocent, mais qui n’ont jamais pu évacuer un doute.
Monseigneur Di Falco a quitté les Unes, quitté les JT, quitté l’actualité. Personne ne perd son temps à rétablir son innocence, à assumer ses propres responsabilités.
C’est au détour d’un billet sur un blog que, le plus naturellement du monde, Renaud Revel, rédacteur en chef à l’Express, range l’affaire Di Falco parmi les dérapages médiatiques regrettables.
« Une sortie de route comme il y en a, hélas, des dizaines dans notre métier et dans nombre d’entreprises de presse, l’Express compris: il y a de cela trois ans, c’est à dire hier, nous nous distinguions avec l’affaire du cardinal Di Falco, injustement accusé dans nos colonnes de pédophilie. Passons…
Pression de la concurrence, excès de précipitation, fatigue passagère, emballement…Toutes sortes de raisons peuvent expliquer ce qui relève du terrible faux-pas. »1
Fort heureusement, le faux-pas est qualifié de « terrible« , car terrible, le « passons… » l’est aussi. Pour Monseigneur Di Falco, ça ne passera jamais. Quoi qu’il en soit, quoi que l’on fasse, quoi que l’on dise, cette catégorie de ceux qui pensent qu’il n’y a pas de fumée sans feu restera, toujours.
J’ai été frappé de la façon dont Renaud Revel l’écrit. Ce n’est pas une révélation, c’est une évidence, une chose entendue, une chose connue : ces accusations étaient injustes, fausses. A la rédaction de l’Express, la chose ne fait apparemment plus débat. Et moi, moi qui devrais être plus favorable, j’ai maintenu un doute.
Ainsi, dans le milieu journalistique, le caractère mensonger des accusations paraît acquis. Mais qui donc a pris soin de rétablir la vérité ?
L’Express n’a pas pris cette peine2. Pour autant que je puisse en juger, il n’y a pas le moindre article sur son site venant dissiper les calomnies qu’ils ont contribué à répandre. Pas un. « Avec Internet, impossible d’oublier« , nous dit Monseigneur Di Falco. Effectivement. Parce que les articles le mettant en cause sont, eux, tous là, tous en ligne, tous présents, sans le moindre avertissement, le moindre rectificatif, le moindre edito d’excuse. Qui cherchera des informations sur cette affaire ne trouvera sur le site de l’Express que la réitération perpétuelle de la calomnie. En somme, une entorse continue à l’éthique.
Car l’innocence de Monseigneur Di Falco, elle ne paraît effectivement pas discutée dans les medias. Voici une revue, Medias, qui publie un très intéressant entretien avec Monseigneur Di Falco. On soulignera que Robert Ménard, anciennement anar, tortskyste puis militant de la LCR, pas plus que Renaud Revel, n’est connu pour ses « accointances » avec l’Eglise3. On y lit notamment, ceci, posé sur le même ton de l’évidence : « Et puis, il a fait la une des journaux, poursuivi pour pédophilie. Aujourd’hui, ces accusations sont tombées. » Le saviez-vous ? Le saviez-vous seulement ?
Nous sommes tous salis. Lui, évidemment, lui, le premier. Mais nous aussi, spécialement ceux qui auraient dû lui faire confiance. Nous avons douté, nous l’avons regardé avec cette horrible suspicion de pédophilie, nous avons manqué de solidarité, de fraternité4. C’est bien le propre de l’odieuse calomnie, qui salit tous ceux qu’elle touche : celui qu’elle vise, celui qui l’émet, comme celui qui la reçoit.
La suite de l’entretien mérite encore la lecture, sur le traitement réservé à l’Eglise dans les medias, sur les télévangélistes, sur l’affaire Gaillot… Mais évoquer ces sujets nous mèneraient trop loin. Retenez toutefois une chose, un nom : Christian Terras. On y apprend en effet que cette affaire est partie de la revue prétendument catholique Golias, et de son tout aussi prétendument catholique directeur de la rédaction Christian Terras. J’aimerais que vous reteniez son nom, pour identifier l’homme lorsque, de nouveau, des journalistes iront l’interviewer complaisamment pour étayer par un prétendu insider les critiques portées de l’extérieur. Chez lui, chez Golias, nulle excuse, au contraire. On persiste dans l’accusation.
* * *
« Avec Internet, impossible d’oublier« . Avec Internet, il serait bon que la presse mette à jour ses obligations déontologiques. Il serait bon qu’elle y mentionne, lorsque l’erreur est acquise, lorsque les faits n’ont pas été établis, l’obligation de faire figurer des avertissements visibles sur chaque article incriminant une personne pointant vers un article rétablissant la réalité des faits, et l’honneur des personnes calomniées.
je m’aperçois qu’il l’avait déjà affirmé, en passant, en mai dernier [↩]
Je connais cet homme, je l'ai rencontré à plusieurs reprises, perso , je pense qu'il était plus attiré par les femmes , cela est évident mais qu'il était chaste, il a écrit un très beau livre que j'ai lu pendant ma retraite à Vence après le décès de ma mère , la bibliothèque de la maison de Matisse possédait son livre.
Je trouve odieux que l'on puisse encore véhiculer un tel message, cela ressemble vraiment à une haine contre le clergé. Même incroyants on peut respecter tout de même.