Woke se diffuse à l’étranger avec une connotation péjorative
En octobre 2019, Barack Obama va fortement critiquer ce qu’il estime être une attitude intransigeante de certains militants et militantes. « L’idée de la pureté, et de l’absence de compromis, et qu’on est éveillé politiquement, et tout ça. Vous devriez arrêter ça très vite. Le monde est compliqué et plein d’ambiguïtés », dit-il.
A partir de ce moment-là, le mot « woke » se diffuse à l’étranger, sous sa version négative. En France, il est labellisé en 2019 « buzzword » par l’agence BETC, qui le qualifie de « posture paresseuse de valorisation personnelle ». Au Québec, le polémiste conservateur Mathieu Bock-Côté le qualifie de « peste idéologique de 2020 ». Et même aux Etats-Unis, le mot a largement pris une connotation péjorative. La définition qui l’emporte sur le dictionnaire de mots d’argots Urban dictionary, qui met en avant les définitions les plus votées par les lecteurs et lectrices, le résume comme le fait d’être « prétentieux et de faire étalage de sa conscience des questions sociétales ».
En France, le mot « woke » ne recouvre pas de mouvement politique réel
Aujourd’hui, le mot « woke » est utilisé en France uniquement comme critique, comme une caricature qui vise à décrédibiliser les personnes engagées contre les discriminations, estime la journaliste Judith Lussier, qui a analysé ces critiques dans son livre On ne peut plus rien dire. Le mot « woke » n’est à notre connaissance revendiqué par aucun activiste anti-discriminations en France, et ne recouvre donc pas de mouvement politique réel. Il est davantage un outil politique et médiatique contre certains activistes de gauche qu’une catégorie d’analyse. « Aucun chercheur français spécialiste des discriminations ne l’utilise », ajoute la chercheuse Sophie Pochic.
Reste qu’il ne faut pas exagérer l’importance de ce terme, finalement employé par une toute petite sphère de militants et d’intellectuelles. En mars, un sondage de L’Express révélait que seules 6 % des personnes sondées connaissent ce que l’hebdomadaire appelait la « pensée woke ». Même au Royaume Uni, où l’on parle pourtant anglais, seulement la moitié des gens ont entendu parler de l’expression « être woke ».
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