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Nolwenn Leroy : "Toutes ces caméras, le prime, il y a vraiment un côté très malsain là-dedans"
Article de type Interview publié dans le genre Variétés Françaises le 21/12/2009 par Christian Eudeline
Paroles doucement susurrées, textes malicieux, impossible de ne pas tomber sous le charme par ce troisième album de Nolwenn Leroy. Un parfait mélange de pop et de folk savamment épurée, quelque part entre Björk, époque Vespertine, Tori Amos et Radiohead, le tout en français. Nolwenn s’acoquine avec le héros du roman de Lewis Caroll, Alice Au Pays Des Merveilles, le chat Cheshire, l’une des plus énigmatiques créatures de roman qui soit et lui emprunte les clés de l’imaginaire. Heureusement, c’est une rencontre bien réelle.
N’y a-t-il pas eu méprise sur la véritable Nolwenn Leroy ?
Je crois que le méprise était inévitable, dans le sens où le premier album Nolwenn Leroy s’est fait dans les conditions que l’on connaît, très rapidement et surtout je faisais partie du package de tout ce que j’ai pu vivre à cette période là, la Star Academy, TF1... J’étais partagée un peu entre l’excitation d’enregistrer un premier disque et puis la frustration de ne pas pouvoir y participer comme je l’aurais souhaité. Après j’ai eu la chance de pouvoir un peu reconstruire les fondations avec le deuxième album Histoires Naturelles, d’apprendre aux côtés de Laurent Voulzy et finalement de pouvoir revenir à quelque chose qui me ressemble. Et c’est ce deuxième album finalement qui m’a permis de faire ce que je fais aujourd’hui, c’est à dire de m’envoler, de me lancer seule, d’écrire intégralement l’album seule, de travailler toute seule. Je pense que c’est ce qu’on attendait de moi, et puis j’avais aussi besoin de le faire.
Etes-vous plus à l’aise aujourd’hui ?
Oui, je suis forcément plus à l’aise parce que cet album je l’ai fait toute seule, j’ai fait ma petite cuisine, enfin toute seule avec Teitur (songwriter danois qui a travaillé avec Radiohead, Rufus Wainwright, Suzanne Vega, Aimee Mann… ndlr) qui est devenu un ami. Cet album s’est fait avec très peu d’intervenants, je l’ai vraiment voulu comme ça, juste un album entre amis, dans une maison studio, entre les Îles Féroé et la Suède. Quelque chose de très artisanal, pas avec un énorme budget, quelque chose de très dépouillé. J’ai enfin réussi à passer de l’autre côté du miroir avec ce troisième album, j’ai une totale liberté, du début jusqu’à la fin et il y a des vrais partis pris au niveau de la musique, de l’image. Je n’ai fait aucun compromis, pour la première fois je dirais de ma courte carrière. Je suis ravie d’avoir pu m’isoler pendant toutes ces années et faire ce que je voulais avec mes amis sans avoir à me justifier.
Album plus personnel mais aussi plus onirique, c’est un aspect de votre personnalité que l’on ne soupçonnait pas.
Moi c’est quand même un petit monde dans lequel je me sens bien, c’est un bel écrin pour mes chansons, c’est un univers qui est rassurant pour moi qui ai toujours été passionnée de légende Arthurienne, bretonne que je suis, par les contes et légendes, par le fantastique. C’est un univers que j’avais déjà commencé à installer dans le deuxième album Histoires Naturelles, ce côté XVIIIème, cabinet de curiosités, étrange, que je décline encore aujourd’hui avec un côté plus victorien, plus anglais, mais toujours Tim Burtonesque. Ce n’est jamais dark, c’est toujours dark lumineux, je dis souvent gothique chic. Il y a toujours une lumière, un côté marrant et une part d’enfance dans ce que je peux faire. Je me sens bien là-dedans.
Pourquoi avoir attendu autant de temps, Histoires Naturelles, votre deuxième album est sorti en 2005 ?
La raison principale, c’est que l’album a intégralement été écrit en anglais, à la base l’album original est en anglais. Et j’ai eu des vraies interrogations à un moment : était-ce là un disque concept sur la langue anglaise ? Ou au contraire ne fallait-il pas trouver un équilibre et en composer la moitié en français et la moitié en anglais ? J’ai pensé que ce second choix plus judicieux et c’est ce que j’ai fait, mais ça a été assez laborieux de réécrire mes propres chansons en français, il y a eu beaucoup de transformations, de changements de thèmes, et ça m’a pris du temps.
Etes-vous superstitieuse ?
Plus ou moins oui mais pas au point de ne pas faire les choses et d’être bloquée parfois parce que je me serai tirée les tarots et que je n’aurai pas un bon tirage, que c’est vendredi 13 ou que j’ai croisé un chat noir dans la rue... J’aime être superstitieuse, j’adore les œillets par exemple alors qu’il paraît que ce n’est pas bon d’offrir des œillets à un artiste qui présente un spectacle.
Préféreriez-vous croiser un chat noir ou un Cheshire ?
Je préfère croiser un Cheshire cat parce que j’ai réussi à le maîtriser, à le dominer, Dieu sait s’il nous a réservé des tours au cours de la réalisation de l’album. C’était la première fois que je drivais véritablement mon projet toute seule avec ce que ça comporte de soucis d’interrogations et d’angoisse parfois. Tant mieux parce que c’est moi qui l’ai voulu. Mais en même temps, il m’a fallu prendre des décisions et c’était une manière vraiment différente de travailler par rapport à ce que j’avais pu faire jusqu’à présent. Sur la pochette, le Cheshire cat, je le porte sur un plateau d’argent, il fait moins le malin parce que je l’ai vaincu.
Vous regardez-vous dans des miroirs ?
C’est extrêmement angoissant de se regarder dans un miroir en fait, au bout de quelques minutes, c’est un test à faire d’ailleurs, lorsque l’on se regarde trop longtemps, on peut devenir presque schizophrène, et les personnes qui auraient une tendance à ça peuvent basculer. Il y a un moment lorsque l’on se regarde dans un miroir où l’on se détache de ce que l’on est et c’est très spécial. Je vous invite à faire le test car c’est très angoissant, au bout de quelques minutes, on ne se reconnaît plus, on a l’impression de voir quelqu’un d’autre. Je n’aime pas trop faire durer cette expérience.
Etait-ce la même chose lorsque vous participiez à la Star Acadmy, vous regardiez-vous à la télé ?
Participer à ce genre d’expériences, c’est quelque chose d’antinaturel alors que paradoxalement on aimerait que vous apparaissiez à l’écran le plus naturellement puisque l’on vous y voit au jour le jour. Mais c’est antinaturel à cause des conditions réunies, toutes ces caméras, le prime, il y a vraiment un côté très malsain là-dedans que j’ai eu beaucoup de mal à appréhender et qui me dérangeait profondément dès le départ. C’est pour ça sans doute que je me suis beaucoup protégée, peut-être à l’extrême, et j’ai peut-être eu une image un peu froide, alors que pas du tout. Ça n'était pas compatible avec le fait d’être un artiste, de garder cette part de mystère, cette part de rêve, lorsque l’on est exposé comme ça à tort et à travers du matin au soir. C’est très difficile de garder cette part de mystère donc ça m’a demandé beaucoup d’efforts pour ne mettre en avant que ce côté musical et le reste du temps garder mes secrets et ne pas me donner en spectacle à tort et à travers. Je détestais me regarder.
http://musique.sfr.fr/mag/article/interview/nolwenn-leroy-toutes-ces-cameras-le-prime-il-y-a-vraiment-un-cote-tres-malsain-la-dedans
*** Message édité par Gégé le 21/12/2009 17:01 ***
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